L’Homme superflu

Après avoir adoré ma découverte de la série Lady Astronaute de Mary Robinette Kowal, je me suis réjouie de la parution d’un nouveau titre one-shot de l’autrice. Intitulé L’Homme superflu, ce roman est une intrigue policière en huis-clos dans l’espace. Il a été publié en février aux éditions Denoël dans la collection Lunes d’encre. Et voici ce que j’en ai pensé…

« Elle avait trop souvent vu râler son conjoint devant des films policiers quand des détectives se lançaient dans une mission secrète, après moult vociférations sur le nombre de cas de disparition qui seraient facilement résolus si lesdits disparus avaient simplement signalé aux autres où ils allaient. Tesla… décevrait Shal si elle agissait aussi bêtement. Vraiment bêtement.»

Agatha Christie dans l’espace

Bien que dissocié de la série Lady Astronaute, L’Homme superflu semble reprendre son univers uchronique et rétro-futuriste en proposant une société de la seconde moitié du XXème siècle au cœur d’un vaisseau de croisière entre la Lune et Mars. L’ambiance nous évoque rapidement un bon Agatha Christie notamment pour son côté huis-clos et son élégance chic. Mais la comparaison ne s’arrête pas là. Très vite, l’intrigue elle-même nous évoque les célèbres enquêtes d’un Hercule Poirot, semant constamment le doute sur les coupables potentiels, égrenant les indices et les révélations tout autant que les revirements de situation. Et quel plaisir! Moi qui me suis nourrie de ces enquêtes policières classiques pendant de nombreuses années, retrouver cette ambiance si particulière et si captivante mais dans l’espace a été un moment délicieux. J’ai lu cette enquête, me laissant être trompée sans ressentir aucune frustration, adorant me rendre compte de mes erreurs et appréciant chaque rebondissement même si l'intrigue suit un fil assez logique. J’ai savouré le roman joliment construit comme on sirote un bon cocktail dont chaque en-tête de chapitre est d’ailleurs pourvu d’une recette alléchante. Et nulle note d’amertume n’est venue gâcher mon plaisir.

« Si vous croyez une seule seconde que je compte laisser passer cette incompétence crasse, illégale et négligente, il va falloir installer une caméra dans vos parties intimes pour mieux voir où je vais caler votre tête.»

Mais de la modernité que diable !

Comme toujours avec l’autrice, l’intrigue porte aussi en creux des valeurs qui lui sont chères et qui modernisent l’histoire bien au-delà de ses références rétro. Le féminisme est assez marqué dans ce roman comme dans ces précédents titres, porté notamment par Tesla Crane mais aussi par son avocate que j’aime du fond du cœur pour ses insultes absolument formidables. On retrouve ainsi des femmes fortes mais toujours faillibles chez Mary Robinette Kowal, mais surtout des personnes compétentes dans des domaines qu’on associé généralement aux figures masculines, que ce soit pour diriger ou pour les sciences. Son héroïne parvient à tirer son épingle du jeu par un charisme et un humour piquant extrêmement plaisant qui lui font surmonter de lourds obstacles physiques et psychologiques. Impossible de ne pas l’admirer pour sa force de caractère, tout autant qu’il est impossible de ne pas s’attacher à sa petite westie Gimlet. Outre ces aspects bienvenus, L’Homme superflu sort aussi de l’habituelle binarité de l’autrice, amenant de l’inclusivité et de l’ouverture à son univers sans que ça ne semble artificiel, bien au contraire. Vous l’aurez compris, je suis plus que conquise. Attention cependant, les plus férus de science-fiction pure et dure n’y trouveront peut-être pas leur compte. Le vaisseau et les aspects plus futuristes servent en effet essentiellement de décorum et d’accessoires à l’intrigue. Il s’agit avant tout d’un bon policier, même si les hublots révèlent le ciel étoilé. En tout cas, pour ma part, j’ai adoré la proposition que j’ai trouvé rafraichissante. Chez moi, les étoiles étaient aussi dans les yeux. 

En bref, avec ses valeurs féministes et inclusives, son écriture savoureuse, son ambiance délicieusement élégante et ses personnages exquis, Mary Robinette Kowal remplit parfaitement sa part du contrat en offrant un roman décidément très réussi. On a le sentiment de lire un Agatha Christie dans l’espace, modernisé mais tout aussi captivant. Je suis conquise.

« Lorsque Tesla Crane, richissime et très célèbre inventrice, embarque sous un faux nom à bord d’un vaisseau de croisière entre la Lune et Mars pour célébrer sa lune de miel, elle est loin de se douter qu’un meurtre va être commis pendant le voyage. Et encore moins que c’est Shal, son tout aussi fortuné et illustre époux, qui va en être accusé par le service de sécurité.

Armée d’un verre de martini et de son humour caustique, aidée de son adorable chien, Gimlet, et de Fantine, son intraitable avocate restée sur Terre, Tesla va tout faire pour innocenter Shal, mettre hors d’état de nuire le criminel et, enfin, reprendre le cours plus ou moins tranquille de son voyage de noces…»

(Illustration de couverture: © Jaime Jones - couverture: Pascal Guérin)

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[Diversité: pp handicapé.e physique, pp végétarien.ne, ps végétarien.ne, ps lesbienne, ps non-binaire]

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[Lecture n°9 (12/60 points avec les bonus pour l'échelon 4 Fusion dans l’utopique) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 12 de Ma lecturothèque + thème Hiver janvier/mars « huis-clos, enquête »]