Mort™ (Trademark, #3)

Après les grandes claques qu’on été Bonheur™ et Vie™, il me tardait de découvrir le troisième opus de la trilogie Trademark de Jean Baret. Cette série est constituée de trois tomes indépendants constituant une trilogie d’idées plutôt qu’une suite. Le dernier opus, Mort™ est sorti aux éditions Le Bélial’ fin septembre et s’attaque cette fois à la question des religions, en plus de reprendre des éléments des deux autres livres. Pour savoir ce que j’en ai pensé, dépensez 1,99 crédits en cliquant ici.

« Chaque nouvelle foi l’enthousiasme pendant quelques mois, puis son intérêt s’étiole. D’ailleurs, le fait qu’autant de religions coexistent l’a toujours intriguée. Comment tous ces dieux peuvent-ils avoir raison en même temps? Jésus, Bouddha, Mahomet, John Smith… Quelle est la bonne réponse? Et surtout, quelle est la bonne réponse à quelle question? C’est quoi, la question? »

Starmania ou le sens de la vie

Jean Baret nous offre cette fois un roman un peu à part dans la trilogie puisqu’on y retrouve des éléments de Bonheur™ et de Vie™ là où ces deux romans semblaient totalement indépendants et s’ancraient sur une seule façon de vivre. L’auteur reprend ainsi son univers ultra-consumériste et de liberté totale (du moment que l’on participe à l’économie et donc au bonheur de toutes et tous) et celui, ultra numérique, dirigé d’une main de code binaire fer par les algorithmes pour une société total égalitaire. Il y a ajoute une troisième donnée inédite, qui ne sera donc jamais exploitée pleinement dans un roman à part entière: une société de religions où croire et pratiquer est un devoir, tout comme le respect de toutes les religions qui cohabitent. Spoiler: ça cohabite pas toujours très bien. Comme c’est étonnant… La grande question de ces trois livres, et particulièrement de ce troisième opus, c’est le sens de la vie « Pourquoi je vis, pourquoi je meurs… ». Question vue par un triple prisme avec trois tentatives foireuses de réponses dans une dystopie sarcastique et puissante qui illustrent trois dérives de notre société plus que défectueuses. L’auteur en profite évidemment pour pointer du doigt les travers de notre présent, en usant de la forme comme du fond dans un roman marquant mais pourtant un peu plus « soft » que les précédents…

« Tous les citoyens d’Algoripolis, sans exception, résident dans les mêmes tours gigantesques dépourvues de toute ouverture sur l’extérieur, dans les mêmes cubes de vie de la même dimension, à ingérer la même pâte alimentaire ou à s’asseoir sur le même fauteuil. Tout le monde est à égalité et peut s’exprimer dans les innombrables hubs contrôlés par les algorithmes. Sa zone est la meilleure des trois. Aucun crime, aucune famine aucune violence, aucune disparité.»

Alors clic-clic ou pas?

J’ai trouvé, dans l’ensemble, que ce troisième opus était moins percutant que les deux premiers. Peut-être que la triple société ne nous permet pas assez d’approfondir les différents sujets. Peut-être aussi que cette nouvelle société, intégrée en demi-mesure, manque de force. Le sujet de la religion, hyper casse-gueule, m’a semblé en effet moins raillé que ne pouvaient l’être les deux autres sociétés, comme si l’auteur sentait le danger du sujet et avait un peu freiné son ardeur. C’est donc beaucoup moins piquant, beaucoup moins trash et un peu moins drôle que les précédents (même si je me suis quand même marré). Le roman dans son ensemble ne provoque pas tout à fait le même uppercut que les deux autres (sauf  peut-être si on commence par celui-ci) bien que l’auteur n’y aille pas avec le dos de la cuillère™ et qu’il nous offre encore quelques messages forts (je pense ici à la critique des médias poubelles par exemple). Le final reste lui aussi assez remarquable à mon avis. Surprenant, il m’a laissée pantoise et contribue à rendre cette lecture au moins un peu cli-clic (comprenez ici que c’est plutôt pas mal). En tout cas, je me souviendrai longtemps de cette fin! Mais ne me confondez surtout pas avec une blogueuse qui en quelque chose à foutre.

"L'univers est sans doute froid et vide. Mais notre monde intérieur est infiniment riche. Et c'est ça, l'être humain. Une machine à fabriquer du sens."

En bref, Mort™ n’est peut être pas le meilleur roman de la trilogie Trademark, car moins percutant et moins piquant là où on attendait un uppercut final qui nous mettrait K.O. Il s’agit néanmoins d’une dystopie assez puissante qui interroge le sens de la vie en critiquant avec force trois dérives sociétales majeures. Enfin, cela vous permet d’apprendre que qu’est la M-Théorie et de sortir du rang, aussi pour quelques crédits supplémentaires, je vous invite à tenter l’aventure et à découvrir le sens de la vie en cliquant ici.

« Rasmiyah vit à Babel. Bien qu’elle réside dans un quartier musulman, c’est une chaos magicienne. Enseignante de profession, elle vénère le dieu serpent Glycon et organise sa vie en fonction du grimoire fondateur de sa religion, le Moon and Serpent Bumper Book of Magic. De l’autre côté de la Bordure, à Mande-Ville, Xiaomi est journaliste. Et gonzo, avec ça. Ses enquêtes génèrent du clic comme s’il en pleuvait — de la consommation en bonne et due forme, bien entendu, mais il ne faudrait pas le prendre pour quelqu’un qui en a quelque chose à foutre. Quant à Donald Trompe, citoyen DN4n93xw dans la zone d’Algoripolis, il partage son quotidien sous l’égide de l’Indominux Lex, loué soit-Il, entre temps d’amour, d’amitié, de loisir et de travail — travail qui consiste à agencer des lettres flottant dans l’espace virtuel de son cube de vie. Ces trois-là ne se connaissent pas. Et pourtant, la M-Théorie va bouleverser leur vie à tous. Et peut-être même bien au-delà… »

(Illustration de couverture: © Aurélien Police)

Trademark #2- Vie™

D’autres avis sur la blogosphère: Le chien critique n’a pas été convaincu, …

[Diversité: pp arabe, pp trans, ps musulman.e, ps noir.e]

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