Le gang des rêves
C’est en regardant la vidéo de Pinupapple & Books que j’ai découvert le livre Le Gang des rêves de Luca di Fulvio, paru en français chez les éditons Slatkine & Cie en 2016 puis en version poche chez Pocket en 2017. Son avis très positif m’avait interpellé, mais ce sont ensuite les innombrables coups de coeur décernés à ce titre qui m’ont convaincu, notamment ceux de @steph_croqueuse_de_livres_ sur Instagram ou bien encore Maks du blog « Un bouquin sinon rien » qui me l’ont conseillé en boucle. J’ai alors eu envie de découvrir moi aussi ce gang, et voici ce que j’en ai pensé…
Je sors des rangs…
Alors que tous les avis croisés sont unanimement convaincus que Le gang des rêves est un chef-d’œuvre, je me retrouve un peu en marge à l’issue de cette lecture parce que je n’ai pas passé un moment aussi magique, et que je suis même bien loin du coup de coeur. Peut-être en attendais-je trop, peut-être (et c’est même plutôt ça) que ce n’est pas fait pour moi, quoiqu’il en soit, Le gang des rêves est une petite brique de 944 pages qui m’a paru assez longue et que j’ai même failli abandonner dans les 300/400 premières pages, ne ressentant qu’un sentiment de déprime et une vague lassitude. Et puis la curiosité et les critiques dithyrambiques m’ont poussé à aller plus loin, et ça c’est révélé plus intéressant vers la page 600 avec une lecture qui est devenue plus fluide parce qu’enfin, un peu d’espoir rayonnait dans cette misère ambiante et que ça soulageait un peu! Le gang des rêves c’est une véritable saga familiale dont l’action se déroule sur 20 ans, suivant le destin de la toute jeune Cetta et de son enfant Christmas vers la conquête du rêve américain. C’est riche d’une ambiance historique assez juste, mais aussi assez lourde, celle de la condition des immigrés européens du début XXème dans les quartiers pauvres de New York. Ce n’est pas une époque qui me passionne énormément, et cette chape de désespoir, de misère et de viols (parce que oui, il y en a beaucoup, je préfère prévenir pour ceux qui, comme moi, sont dérangés par ça dans les livres) m’a plombé le moral en flèche. Et si j’aime, en général, verser quelques larmes pour des héros dans un livre, j’aime aussi que le roman fasse de temps en temps des petits moments de grâce qui redonnent le sourire. Là, j’ai du attendre 600 pages… c‘était long! Mais c’est surtout le rythme assez stagnant qui m’a quelque peu ennuyé, si certes 20 ans s’écoulent dans ce livre, hormis le début de l’histoire de Cetta, et les 300 dernières pages, l’action a tendance à se répéter, à s’enliser. Alors certes, c’est réaliste, mais quand je lis un roman je veux du rêve, pas du réel… Je regrettais aussi que quand l’histoire d’un personnage avançait enfin, elle avait tendance à reculer à nouveau 30 pages plus loin, me donnant l’impression que, purée, on n’y arriverait donc jamais au dénouement! Du coup, je le conseillerai à ceux que les romans historiques passionnent, que l’époque intéresse, ou qui apprécient les sagas familiales, mais n’étant dans aucune de ces catégories, je me suis sentie hors du gang…
« […] ces gens parlaient de l’Amérique comme d’un mirage, comme de quelque chose qui n’existait que dans les histoires, alors qu’elle était pourtant là, devant leurs immeubles: comme s’ils ne savaient pas la voir, la saisir! comme s’ils étaient partis mais jamais arrivés! »
De touchants rêveurs
A la lecture de la première partie, vous vous dites certainement que j’aurai dû abandonner la lecture. Mais ce qui m’a fait tenir et qui a rendu, finalement, la lecture plutôt fluide, ce sont les personnages, avec en tête, non pas Christmas, comme tout le monde, mais Cetta. Cetta est pour moi le point fort de ce livre, sa vie est d’un tragique fou, mais elle conserve un optimisme sans faille, un courage incroyable et une force impressionnante. J’ai aimé son histoire, j’ai apprécié son influence sur son entourage (notamment Sal qui fait aussi partie de mes petits chouchous) et je pense que je me serai satisfaite d’une histoire sur elle car elle a tellement l’étoffe d’une héroïne que je la souhaitais plus mise en avant encore. Il y a aussi tout un palmarès de personnages secondaires intéressants, qui contrebalancent les clichés, comme Cyril, Pep, Bessie, les gros gangsters de New York, etc. C’est une fresque assez riche et très diversifiée que l’auteur a créé ici et on se plaît à lire les passages permettant de retrouver l’un ou l’autre. Je trouve juste dommage que l’auteur se soit si attardé sur les psychologies de Ruth et Christmas. Certes, le travail est précis, juste et approfondi, mais il laisse trop peu de place aux autres personnages. D’autant que, si je comprends Ruth, elle ne me captive pas, et si j’ai adoré Christmas au départ, imaginant tout de suite son regard si expressif et sa voix si vive, il a finit par me lasser à la longue de broyer du noir (oui, les gens malheureux qui se laissent aller m’ennuient ^^). Leur histoire n’est pas celle que j’avais le plus envie de retrouver dans cette immense saga, mais elle m’était malgré tout 100 fois plus agréable que les chapitres sur Bill… Certes, son rôle est essentiel à l’histoire des personnages, mais je ne comprends pas l’intérêt de lui donner autant d’ampleur. Beaucoup des passages de sa vie auraient pu être raccourcis, voire supprimés, sans que cela n’enlève quoique ce soit au récit. Et comme je le disais, les passages de viols c’est vraiment un truc que je n’apprécie pas dans les romans, alors avec lui, j’étais servie…
« Les explications ne l’intéressaient pas. Les choses étaient ce qu’elles étaient. Et pourtant, rien ni personne ne pourrait la soumettre. Cetta, tout simplement, ne leur appartenait pas. Elle n’appartenait à personne. »
« Bonsoir New York! »
Il y a quand même du bon dans Le gang des rêves, sans quoi je n’aurai jamais avalé 944 pages en une semaine. C’est une lecture fluide, bien écrite et d’un grand réalisme. La période historique est bien retranscrite, l’ambiance pesante, elle aussi, et le destin de ces personnages plus qu’incertain passionnera les amateurs de tragédie. C’est aussi une plongée dans le monde des gangsters du début XXème, sur fond de prohibition, de crimes et de trahisons. En fait, ce roman, c’est un hommage à cet univers si particulier des films de gangsters, on y retrouve un peu de Le parrain, ou de Il était une fois en Amérique. Mais c’est surtout un hommage au rêve, parce que sans les rêves fous qui inondent la tête de ces immigrés, il n’y aurait plus ni l’espoir ni le désespoir, seulement une acceptation. Cetta rayonne de rêves et survit grâce à cela, Chistmas, lui, vend du rêve. Et Le gang des rêves nous rappelle avec beaucoup de justesse, que tout le monde a besoin de belles histoires et d’espoir.
En bref, Le gang des rêves ne sera pas mon coup de coeur de l’année comme il le fut pour beaucoup, mais il m’aura quand même embarqué sur 944 pages (cette brique!) dans un registre que je ne lis presque jamais, et ça c’est déjà un exploit. Je ne peux que vous conseiller de lire les autres critiques qui crient au chef-d’oeuvre pour ne pas passer à côté d’une lecture que je suis presque la seule à ne pas avoir apprécier totalement.
« New York ! En ces tumultueuses années 1920, pour des milliers d’Européens, la ville est synonyme de « rêve américain ». C’est le cas pour Cetta Luminata, une Italienne qui, du haut de son jeune âge, compte bien se tailler une place au soleil avec Christmas, son fils. Dans une cité en plein essor où la radio débute à peine et le cinéma se met à parler, Christmas grandit entre gangs adverses, violence et pauvreté, avec ses rêves et sa gouaille comme planche de salut. L’espoir d’une nouvelle existence s’esquisse lorsqu’il rencontre la belle et riche Ruth. Et si, à ses côtés, Christmas trouvait la liberté, et dans ses bras, l’amour ? »
(Photographie de couverture : © Bert Hardy/ Picture Post/ Getty images)
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