Le dieu oiseau

Après ma très belle lecture de Mers mortes, j’ai poursuivi ma découverte de l’univers d’Aurélie Wellenstein avec Le Dieu oiseau. Finaliste du Prix Littéraire de l’Imaginaire Booktubers app (PLIB) 2019, ce titre a été publié en 2018 par les éditions Scrineo. Il fut également finaliste du prix Imaginales des lycéens 2019. Voici ce que j’en ai pensé…

« Si elle cherchait à le décourager, c’était par amitié, par peur pour lui, mais au fond de son coeur, elle soutenait sa démarche. En plus de ses propres espoirs, le jour des sélectifs, Faolan porterait ceux des autres opprimés.»

Une plongée dans la barbarie humaine et la folie

Le Dieu oiseau nous emmène dans un univers coupé du reste du monde aux pratiques plutôt atroces mais tellement empreintes de mythes et de croyances anciennes qu’elles semblent immuables. Reprenant en partie les codes de dystopies young adult, Aurélie Wellenstein y ajoute une noirceur et une violence qui basculent l’univers et les personnages dans une horreur beaucoup plus adulte. Ainsi, certaines descriptions, notamment du cannibalisme et des massacres du banquet et des sacrifices, sont parfois difficilement soutenables. Âmes sensibles s’abstenir. Et du coup, sans jamais tomber dans le travers de la facilité, son intrigue prend d’ailleurs des chemins inattendus qui vont vraiment malmener Faolan qui a déjà pourtant tant souffert durant 10 années d’esclavage et de sévices. Très imaginative, l’autrice empreinte des voies scénaristiques imprévisibles qui vont sans cesse faire osciller les personnages entre humanité et monstruosité. Ainsi, Faolan, très attachant et très touchant est parfois extrêmement dérangeant. Ce basculement constant vers la folie barbare qui patine ce monde est la grande force de ce récit. Impossible de prévoir les choix que feront les protagonistes tant leur psychologie complexe est tourmentée et malmenée. Et nous-mêmes n’en ressortons pas tout à fait indemnes d’avoir tant frôlé la part sombre de notre humanité lors de la lecture. L’univers proposé interroge aussi les actes de barbarie que l’homme peut continuer de perpétuer sous couvert de religion ou de tradition. Et ça, forcément, ça m’a plu!

« Depuis des siècles, ils s’étripaient pour plaire aux dieux et expier une faute dont personne ne se souvenait. Cette tradition serait-elle un jour abolie? »

Un roman initiatique sur la vengeance et le traumatisme

Plus qu’une quête, Le Dieu oiseau est à mon sens un véritable roman psychologique qui interroge le pouvoir de la vengeance à travers tous les protagonistes de ce monde coincé dans la barbarie depuis des siècles. Car ses clans destinés à se massacrer charrient des souffrances, de la rage et des traumatismes qui rendent chaque personnage à la fois très dangereux et terriblement vulnérable. D’ailleurs, cette rage et cette douleur mêlées parsèment tant le récit qu’on les perçoit pleinement en tant que lecteur. Ce qui prouve aussi que l’écriture d’Aurélie Wellenstein est très immersive. En conséquence, on est parfois un peu mal pendant cette lecture, d’autant que l’autrice ne nous épargne pas, tout comme elle n’épargne pas les personnages. Mais ça n’aura pas suffit à entacher mon plaisir de lecture tant l’histoire et l’univers sont aboutis, et l’intrigue haletante. J’ai juste ressenti de légères longueurs durant le passage dans la jungle, empêchant un avis dithyrambique, mais c’est vraiment histoire de chercher la petite bête. Enfin, le final, quant à lui, m’a scotché comme celui de Mers mortes. Voilà une autrice qui sait soigner ses conclusions! Une qualité assez rare pour être soulignée. 

En bref, Le dieu oiseau est un roman de dark fantasy qui extrêmement précis d’un point de vue psychologique. Sombre, dérangeante, oscillant entre humanité et monstruosité, l’intrigue ne peut pas vous laisser indifférent. Il fait en tout cas parti de mes deux favoris parmi les finalistes du PLIB à l’heure actuelle (il m’en reste encore un à lire!).

« Une île. Dix clans. Tous les dix ans, une compétition détermine quel clan va dominer l’île pour la décennie à venir. Les perdants subiront la tradition du « banquet » : une journée d’orgie où les vainqueurs peuvent réduire en esclavage, tuer, violer, et même dévorer leurs adversaires. Il y a dix ans, Faolan, fils du chef de clan déchu, a assisté au massacre de sa famille. Sauvé par le fils du chef victorieux, Torok, il est depuis lors son esclave et doit subir ses fantaisies perverses. Sa seule perspective d’avenir est de participer à la compétition de « l’homme-oiseau », afin de renverser l’équilibre des pouvoirs en place et de se venger. Qui du maître ou de l’esclave va remporter la bataille ? Quel enjeu pour les habitants de l’île ? Quel est le prix à payer pour la victoire ?»

(Illustration de couverture: © Aurélien Police)

> Lire un extrait < (© Scrineo)

[Lecture n°21/36 (pour l'échelon 3) pour le Challenge de Littérature de l'Imaginaire édition 7 de Ma Lectorutothèque]

Finaliste du #PLIB2019 #ISBN9782367405827 #ISBN:9782367405827